vendredi 3 avril 2009

Face à mes contradictions

Sikasso









Il faut être prêt à faire face à toutes sortes d'eaux ici, à toutes sortes de décors plus charmants les uns que les autres, plus déconcertants, rarement attendrissants, souvent choquants et pour la plupart du temps troublants.
Mais notre esprit, et j'en remercie l'intelligence humaine, s'adapte (enfin pour moi) relativement rapidement à tous ces décors que mes yeux balayent, à ces contextes dont ma tête est témoin, et à ces scènes auxquelles mon coeur assiste.
Je comprends la différence entre moi et l'autre, quoique l'essence est la même: l'Humain

J'arrive à comprendre, et ce pour ne pas m'effondrer à chaque fois, que ce n'est pas moi, ce n'est pas le choix que mon âme a fait, ce n'est pas l'entente qu'elle a conclue avec le Grand Divin.
Plutôt, je suis spectatrice, trop souvent d'un triste spectacle, une morbide représentation, dans laquelle tous et chacun se retrouvent confrontés à une fatalité trop précaire et menaçante.

Malgré tout, je décide de voir le beau, de goûter le bon, de rencontrer le divin, d'embrasser la vie et de boire goulûment aux lèvres de mère nature.


Mon esprit sélectionne, enregistre et emmagasine ces éléments de bonheur pour en faire un Tout:

Le BEAU ce sont les sourires rayonnants des femmes riant entres elles, transportant sur leur tête les sceaux de fruits et légumes, savons, tissus. Les enfants qui chantent, crient de joie à ma venue, rient à pleine bouche, le coeur ouvert, les yeux étincellants;

Le BON ce sont les fruits dégoulinant de sirop sucré, les brochettes de poisson capitaine BBQ succulentes, les légumes croustillant de fraicheurs, les jus frais débordant de vitamines;

J'EMBRASSE la vie à travers la contemplation du soleil se couchant sur un ciel lourd et humide déployant ses rayons sur la terre rouge et poudreuse;
J'EMBRASSE la vie lorsque la rencontre me sourie, j'élève mon regard pour croiser celui de l'autre, puis échanger en quelques salutations la chaleur de l'humanité, le transfert, la relation. Aussi banales que sont les salutations, elles offrent une profonde reconnaissance de l'autre et de son existence.

J'entends vos questionnements ''Quelles scènes? Quels décors?'' Dites vous...

Des enfants sales, aux vêtements déchirés, délabrés, les dents pourries, les yeux creux, le ventre et le nombril gonflés. Il y en a à tous les coins du monde, au Canada même dites vous.. Oui dans les pauvres quartiers de Montréal, dans les coins sombres des ruelles profondes... c'est une scène à laquelle on doit faire face quotidiennement. Eux-mêmes n'ont probablement pas le courage de se regarder dans le miroir.. En possédent-ils un même?

La tendre enfance est vite basculée à l'instinct de survie. Le besoin de réconfort et de sécurité est vite anéanti par l'incapacité d'une mère rachidique de transmettre, d'offrir, de donner à ses enfants une vie meilleure que ce qu'elle a connue elle-même; cette vie contre laquelle elle se bat de jours en jours pour survivre.
L'ossature de sa machoire, l'orbite de ses yeux forment les traits de son visage éteint, elle tient dans ses bras lourds un enfant au regard perdu, vitreux, embrouillé, qui lui ne cherche qu'à têter le peu de lait qu'il peut extraire du sein chétif de sa mère.

à l'opposé du portrait, je vois des femmes grandes, grosses, d'une stature immense, géante aux seins ronds gorgés de lait que les poupons dévorent à pleine bouche ttss ttsss ttss le lait s'écoule sur son cou, il est collé de ce sirop nutritif et riche. L'enfant est bien portant, dodu et jouie de toute l'attention, l'affection, la sécurité dont il a besoin pour s'épanouir. Et si ce n'est pas un sein, c'est l'autre qu'elle tire de son habit coloré et qu'elle porte généreusement aux lèvres de l'enfant qui, 20 minutes plus tard, en redemande encore!!
L'Afrique est le portrait parfait des paradoxes, des contradictions:
On retrouve abondance et manque;
Richesse et pauvreté extrême;
Rires profonds et cris de souffrances;
Des habits scintillants ornés de broderies délicates et des limbeaux de tissus virevoltant sous le vent poussiéreux;
Des têtes tressées, des chevelures reluisantes, peingnées avec grand soin et des têtes hirsutes, ibouriffées (comment s'écrit ce mot?) croutées de plaies;
Des 4X4, des mercedes cirées aux moteurs ronronnant, déambulant les grandes avenues et les hommes poussant des charettes débordant d'ordures;
Les uns vendent et les autres quémandent;
les uns bouffent, se régalent de festin abondant et les autres se contentent de restants.

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